Réussir l'intégration des nouvelles recrues

Comment réussir l’intégration des nouvelles recrues ?

Bien recruter, intégrer et fidéliser votre personnel est un défi qui peut paraître parfois insurmontable dans le secteur médicosocial. En 3 articles consacrés au recrutement, à l’intégration et à la fidélisation de vos nouvelles recrues, je vous partage des clés pour améliorer vos chances d’y arriver. 

Nous avons vu, précédemment, que faute d’un nombre suffisant de candidats formés et avec expérience dans le social et médicosocial, il allait devenir nécessaire de baisser son niveau d’exigence. Parmi les pistes, une sélection sur les compétences comportementales et non plus sur les compétences métier.

Dois-je baisser mon niveau d’exigence pour recruter ?

Privilégier ouvertement le niveau de motivation et les compétences comportementales, au diplôme et à l’expérience revient à un véritable renversement des normes, à l’instar de ce qu’appliquent depuis longtemps les anglo-saxons. Un modèle qui privilégie en effet une personnalité, un potentiel, une envie de découvrir, d’apprendre et de progresser plutôt qu’un diplôme et des compétences.

Mais, car il y a un mais…

Si j’abaisse mon niveau d’exigence pour sélectionner les candidats, comment réussir leur intégration ?  

Il est alors nécessaire de renforcer l’étape de l’intégration… L’intégration n’est pas ici limitée au jour d’arrivée, mais aux semaines et aux mois qui vont suivre l’arrivée dans la structure.

Il existe deux étapes dans l’intégration.

L’intégration administrative

La première est d’ordre plutôt administratif. Elle va du recueil des documents administratifs auprès du nouveau recruté à la remise d’un livret d’accueil en passant par sa présentation aux différents services. Dans bon nombre d’organisations, il existe une procédure écrite de recrutement qui reprend l’ensemble de ces étapes. Cette procédure doit être envisagée à l’échelle de la structure. Cette étape est indispensable, mais elle n’est pas suffisante.

L’intégration dans l’activité de l’équipe

L’intégration dont il va être question ici, concerne l’intégration dans l’activité de l’équipe.

Comment intégrer efficacement les nouveaux professionnels

Nous recommandons que chaque équipe travaille sur son propre processus d’intégration. Et que cette réflexion se déroule sous la forme d’une séance d’idéation (ou « brainstorming« ), comme exposé dans un précédent article.

Pour quelle raison ?

Parce que l’ensemble de l’équipe va devoir s’impliquer pour intégrer le nouveau membre. Aussi, pour s’assurer de l’adhésion et de la bonne participation de chacun au processus, le hiérarchique aura tout intérêt à solliciter la participation et la contribution de tous.

De ce temps d’idéation ressortira un certain nombre d’actions et d’étapes, qui seront ultérieurement détaillées en autant de fiches actions. La pertinence de ce process et de ces fiches actions sera régulièrement évaluée. Tous les 6 mois, tous les ans, peut-être… En réalité, tant que ces outils ne remplissent pas leur rôle et dès lors qu’ils ne le remplissent plus, ils doivent être réajustés.

Se former au tutorat sera peut-être nécessaire pour faciliter l’intégration

Toutes les actions évoquées lors du brainstorming seront vraisemblablement très proches de celles que l’on rencontre dans le cadre d’un tutorat. Le tutorat concerne, certes, les stagiaires. Mais les professionnels débutants (débutants en âge et/ou en expérience dans la fonction) ont également besoin d’un accompagnement rapproché. Accompagnement trop souvent négligé… faute de temps

Que faire quand le temps manque pour l’intégration des nouveaux ?

Le traitement de cette question doit être considéré comme une priorité absolue. Ce qui signifie :

  • Voir ce qui, dans les activités de chaque professionnel impliqué dans le processus d’intégration des nouveaux collègues peut être « délaissé » au profit précisément de cette intégration.
  • Ce qui revient à accepter de travailler en mode dégradé, de façon assumée et pendant un temps délimité. Y compris en informant partenaires et / ou donneurs d’ordre de cette situation… temporaire.

De « façon assumée » signifie donc que ce mode de fonctionnement a été pensé, préparé et qu’un terme a été fixé. Certes, cette situation n’est pas enviable. Mais elle est préférable à un fonctionnement en mode dégradé permanent qui ne dit pas son nom et qui, de fait, n’a été ni préparé, ni organisé et qui semble sans fin et sans issue.

Car les conséquences d’un tel fonctionnement peuvent vite devenir hors de contrôle : les dysfonctionnements et la souffrance au travail ne peuvent que s’aggraver de façon exponentielle.

Que risque-t-il de se passer si le temps de l’intégration n’est ni organisé ni prioritaire ?

Le nouveau venu ne reste pas. Et la situation continue de s’aggraver :

1. Aggravation de la situation pour le hiérarchique intermédiaire

Le hiérarchique se retrouve dans la situation où il va de nouveau essayer de compenser les absences. Très rapidement, il se retrouve à tous les postes, ses journées de travail sont sans fin, sans compter le travail qu’il emmène chez lui. Il s’épuise de plus en plus et, bien sûr, il ne peut plus faire le travail qui est attendu de lui par ses équipes. A ces constats délétères s’ajoutent deux phénomènes :

  • Il ne se sent plus respecté, car sa propre hiérarchie l’assigne à tous les postes sans, bien sûr, la moindre revalorisation salariale.
  • Lui-même perd progressivement confiance en lui : non reconnu, en état d’épuisement professionnel, il a le sentiment de faire un travail de mauvaise qualité et donc, de n’être pas ou plus compétent.

Dans ce contexte,

  • Il peut, au mieux, tenter de reprendre le contrôle de son parcours en se rapprochant de collègues dans la même situation que lui. Pour tenter de réfléchir à une action :

Dans un établissement où le nombre de postes vacants avait, depuis longtemps, dépassé la limite du supportable, une équipe de chefs de service avait décidé, individuellement, de se faire arrêter par leur médecin traitant : « On n’en peut plus ! On va tous se faire arrêter par notre médecin. Nos médecins respectifs, sans se concerter car ils ne se connaissent pas, disent déjà à chacun d’entre nous qu’il a dépassé la limite de l’épuisement depuis longtemps »…

Une telle forme d’appel au secours traduit un véritable mal-être.

  • Le hiérarchique peut aussi décider de partir avant qu’il ne soit trop tard pour lui :

« Aujourd’hui, un chef de service du médicosocial a toutes les chances de finir soit divorcé, soit alcoolique, soit les deux… » déclarait l’un d’eux dans l’une des formations en management que nous avons animées.

  • Au pire, enfin, cette situation se solde par un « burn-out ».

Dans tous les cas, quel que soit le scenario retenu, la situation se solde par un échec et une aggravation des difficultés pour tous.

2. Aggravation de la situation pour les professionnels de l’équipe

  • Dans le même temps, en effet, les professionnels de l’équipe sont fortement impactés : moins le hiérarchique remplit sa fonction de management, d’animation, d’organisation, de régulation, plus les équipes sont en difficulté. Des difficultés parfois renforcées par des solutions qui n’en sont pas. Telles que l’intérim ou des remplacements réalisés par des néophytes, qui peuvent contribuer toujours plus à l’aggravation de la situation… Comme par exemple dans cet internat où, faute de candidat plus approprié, un intérimaire du secteur bâtiment a, une nuit, remplacé le surveillant de nuit titulaire… auprès d’un public en situation de handicap psychique.
  • Avec ces équipes en difficulté, la charge de travail s’intensifie et les professionnels s’épuisent.
  • Les arrêts maladie se multiplient, au risque de laisser aux collègues une charge supplémentaire qui va les épuiser à leur tour.
  • L’épuisement et la sensation d’un éternel recommencement, à la manière de Sisyphe, finissent par avoir raison de ceux qui étaient pourtant les plus motivés. Ces « anciens » préfèrent changer de structure voire, changer de secteur. Car il peut y aller de leur survie. Surtout si, en plus de la charge, ils subissent des violences de la part de certaines personnes accueillies.

Devant un tel constat, la priorité doit être sans conteste…, quand il en est encore temps, la réflexion sur l’intégration des nouveaux au risque de voir la situation se dégrader sans plus pouvoir intervenir ensuite.

Car de fait, il est impossible que la situation se résolve seule. Nous le voyons, la question du temps « je n’ai pas le temps » ou « on n’a pas le temps » ne tient pas.

3. Conséquences sur l’activité, si le temps de l’intégration n’est pas pris

Le risque principal est de devoir « réduire la voilure »…

Jusqu’à conduire à ce qui paraissait impensable il y a quelques années … : des personnes accueillies ont pu, même momentanément, être renvoyées chez elles avec toutes les conséquences que cela a pu entraîner…

Carole Logiez

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